Quand je revois mon enfance, le seul fait d’avoir survécu m’étonne. Ce fut, bien sûr, une enfance misérable : l’enfance heureuse vaut rarement qu’on s’y arrête. Pire que l’enfance misérable ordinaire est l’enfance misérable en Irlande. Et pire encore est l’enfance misérable en Irlande catholique. » C’est ce que décrit Frank McCourt dans ce récit autobiographique. Le père, Malachy, est un charmeur irresponsable. Quand, par chance, il trouve du travail, il va boire son salaire dans les pubs et rentre la nuit en braillant des chants patriotiques. Angela, la mère, ravale sa fierté pour mendier. Frankie, l’aîné de la fratrie, surveille les petits, fait les quatre cents coups avec ses copains. Et, surtout, observe le monde des adultes. La magie de Frank McCourt est d’avoir retrouvé son regard d’enfant, pour faire revivre le plus misérable des passés sans aucune amertume
Edition: Belfond
Nombre de pages: 430 pages
Mon avis: Francis McCourt est né aux Etats-Unis, mais il est issu d’une famille irlandaise.
Dans les années 40, la vie n’est pas facile, et il faut parfois faire des économies de bouts de chandelle. Mais dans la famille McCourt, on n’a même pas de bout de chandelle… Pas toujours de pain non plus, pas de couverture, pas de chaleur…
Le petit Franck nous raconte, avec son langage d’enfant, ce qu’a été cette existence de misère noire. Il nous raconte toutes les petites combines pour essayer d’obtenir un quignon de pain. Les aides sociales difficiles à obtenir, la scolarité compliquée, les ivresses de son père, le désespoir de sa mère, les décès de ses petits frères.
J’ai été très secouée par ce livre. J’ai eu le cœur au bord des lèvres à de nombreuses reprises. Franck nous raconte des choses ignobles comme si elles étaient tout à fait normales. Et de son point de vue, ça devait l’être, puisque c’est tout ce qu’il connaissait de la vie.
Il explique la faim qui les tenaillent, lui et ses frères, l’envie d’un simple caramel qui leur semblait inaccessible, le rêve de jambon qu’ils ne pouvaient pas s’offrir, la honte d’avoir des vêtements troués. Tout petit déjà, il est bien obligé de se débrouiller par lui-même pour se nourrir, quitte à chaparder l’étal d’un magasin.
Entre une mère désabusée et un père alcoolique et absent, Franck prend son rôle de grand frère, et presque de père de famille, très à cœur.
Une fois revenu en Irlande, les choses ne s’améliorent pas, bien au contraire, puisqu’ils se retrouvent à nouveau la plupart du temps livré à eux-mêmes. Ils continuent à avoir faim, froid, peur et honte.
Je savais que la situation en Irlande, à l’époque, était dramatique. Mais lire ce témoignage m’a rendu les choses beaucoup plus réelles, plus noires encore.
Ce qui est le plus épouvantable, finalement, dans ce livre, c’est cette façon si simple, et presque enjouée, qu’a l’auteur de nous expliquer ce qu’il a vécu.
Une scène en particulier m’a fait venir les larmes aux yeux: poussé à la porte par l’homme qui héberge sa mère et ses frères, il n’a d’autre choix que de se réfugier chez un oncle. Oncle qui termine son repas et va se coucher sans même penser à lui donner quoi que ce soit. Franck raconte qu’il lèche le papier journal qui entourait les frites, pour en récupérer la plus petite saveur, sans savoir ce qu’il pourra faire le lendemain…. J’ai été choquée devant d’inhumanité de la part de son oncle, et le désespoir pur qui transparaît dans ces quelques lignes.
C’est un témoignage poignant, bouleversant, que nous offre Franck McCourt. Je n’avais jamais eu l’occasion de lire ce livre. Et quelque part, je suis contente d’avoir attendu d’être assez réfléchie pour entendre ce qu’il avait à dire, pour comprendre ce livre. Il y aura, pour moi, un avant et un après Les cendres d’Angela.
Je remercie l’édition Belfond pour cette lecture bouleversante.