Une fresque monumentale qui embarque bourreaux et victimes sur l’océan de l’Histoire.
Il y a Margarita, juive polonaise enceinte qui tue un lieutenant nazi pour venger la mort de son époux et déclenche alors une terrible opération de représailles ; le couple Kramer, fermiers allemands qui recueillent et cachent la jeune femme ; Lisa, la petite fille qui verra le jour à la ferme et sera élevée comme une Kramer ; et il y aussi Anna, jeune juive allemande écartée de la Shoah par un officier SS qui la désire ; Shimon, son fils né d’un viol collectif ; Sarah, Ruth et tant d’autres, qui tentent de reprendre pied après les camps ; Peretz Sarfati, l’Israélien qui veut faire émigrer en Palestine ses coreligionnaires rescapés et qui tombe éperdument amoureux d’Anna… Et il y a l’Histoire « avec une grande hache », qui emmêle et concasse et tisse cette immense saga historique entre l’Allemagne, les Carpates, la Pologne et Israël.
Edition: Presses de la Cité
Nombre de pages: 614 pages
Mon avis: Pendant la Seconde Guerre Mondiale, certains montent au pouvoir pendant que d’autres descendent plus bas que terre. Dans cet échange de place, beaucoup y perdent, et peu en sortent sans cicatrices.
C’est d’ailleurs après la guerre qu’elles commencent à apparaître. Pour Lisa, qui a hérité d’une grand-mère mais qui n’a pas connu sa mère; Pour Anna, qui aime son enfant, mais qui ne sait pas qui son père; Pour Peretz Sarfati, qui a voulu aimer, mais qui n’a pu établir de véritable relation solide; Pour Mme Kramer, qui a perdu son maison et tous ses biens, mais qui survit malgré tout;…
Dans ce roman, les destins se croisent et s’éloignent, avant de parfois se rapprocher. Entre rescapés de camps de concentration, nouveau-né jeté sur les routes en pleine débâcle, soldat SS se cachant sous une fausse identité et tout ce besoin de réconfort et de reconnaissance qui accompagnent chacun des pas de tous ces personnages.
Je dois dire que l’histoire est complexe, lourde parfois, voyageant, faisant de larges détours avant d’arriver à une explication. J’ai tenu là, durant quelques jours, ce qu’on peut appeler un joli pavé.
Le style d’écriture est très particulier. Mêlant poésie à des scènes de cruauté sans nom, et joignant des moments d’émotion à des périodes de tempérament froid, l’auteur chamboule, bouscule. Il émeut, parce qu’il creuse pour montrer les pensées les plus profondes, mêmes celles qu’en temps normal, on n’aborderait pas.
Malgré ce ton lent circonvolutif, je n’ai pu faire autrement que de m’attacher à tous ces personnages. Les uns après les autres, présentés au moment le plus critique de leur existence, ils démarrent le voyage que leur fait faire l’auteur avec très peu d’armes dans les mains.
Un autre aspect, rarement évoqué dans les romans, ou du moins ceux que j’ai lu jusqu’ici, est la reconstruction de l’Allemage, après la guerre. Comment tous ces rescapés de camps de la mort se sont retrouvés en camp temporaire, le temps de leur trouver un logement et des solutions. Comment tous ces soldats qui avaient imposés une loi de peur ont pu changer de nom, disparaître dans la nature. Comment certains ont cherché pendant des années des membres de leur famille, en vain.
En écrivant cet avis, je réalise que bien qu’il soit complexe, le livre est magnifique de réalisme. L’auteur a su s’inspirer des faits pour broder autour une histoire qui tienne la route, et qui aurait pu, elle aussi, être bien réelle. Encore un aspect qui me plaît, bien sûr, cette recherche de faits véridiques.
En tout cas, bien qu’il y ait déjà quelques jours que j’en ai terminé la lecture, ce livre continue de me suivre. Comme quoi, il vaut vraiment la peine d’être découvert.
Je remercie l’édition Presses de la Cité pour cette lecture si complexe.
Je ne sais pas si je pourrais le lire. Par contre j’aimerai savoir ce que deviennent chaques personnages que tu as cités! Je suis curieuse ?
on sait tout dans le livre hihi